- Thedjezeyri14 a écrit:
- Anoushirvan a écrit:
- J'ai indiqué plus haut que j'en étais venu à la conclusion que ce verset était un ajout ultérieur.
Le problème pour moi est le mot "salihat" (صَّٰلِحَٰت), utilisé 62 fois dans le Coran. Or 61 fois, il désigne les bonnes actions, et non les femmes vertueuses.
Quand un mot est utilisé exceptionnellement dans un verset dans un sens qui n'est pas usuel, je suspecte que ce verset est un ajout ou une altération ultérieur par un scribe qui parlait un dialecte différent ou plus tardif.
A cela s'ajoute le problème du mot "ghayb" ("invisible") dans le verset 4.34 que Shahrour n'explique pas : Fālşşāliĥātu Qānitātun Ĥāfižātun Lilghaybi Bimā Ĥafiža Allāhu
Je ne rejette pas ta conclusion parceque elle ne vient pas de nul part il y'a un arguments assez frappant derrière mais , ne trouve tu pas que c'est trop rapide ?? As-tu vraiment fait le tour des tentative d'interprétation avant de conclure un ajout ??
Pour ghayb vite fait je dirais que ça concerne les secrets de la relation .
En fait, la question de l'interprétation et la question de l'interpolation sont deux questions distinctes. L'une n'empêche pas l'autre.
Ce qui me dérange dans l'interprétation de Shahrour, c'est le hiatus entre la première partie du verset (les "rijal" ont la responsabilité de soutenir, financièrement, culturellement, etc, les "nisa" en raison des compétences qu'Allah a octroyées aux uns plutôt qu'aux autres) et la seconde partie ("les femmes qui disposent de ces compétences...").
Selon son interprétation, la première partie est d'ordre général, indépendamment du sexe.
Mais selon son interprétation, et avec le complément que tu apportes plus haut sur "ghayb", la deuxième partie ainsi que le verset suivant 4.35 sont d'ordres familiaux et privés.
Du coup, je ne vois pas le rapport et l'enchaînement logique entre la première partie et la seconde dans cette interprétation.
Donc je pense tel qu'il a été écrit et connu actuellement, le verset 4.34 concerne bien le rapport familial entre hommes (les "rijal") et les femmes (les "nisa") et n'est pas un verset d'ordre général sur les rapports entre riches et défavorisés.
La seule marge de manoeuvre dans l'interprétation, à mon avis, est le sens du verbe "daraba" qui est interprété et traduit dans le sens de "frapper".
Dans ce lien un coraniste, Wakas, le fondateur du site free-minds.org, se livre à une revue des tafsirs, et compare les sens possibles du mot "daraba".
En comparant l'usage du mot "daraba" dans le Coran, il en vient à la conclusion que "daraba" dans le verset 4.34 a le sens de citer en justice,
grosso modo d'introduire une procédure de séparation. Ce sens a aussi l'avantage d'être cohérent avec le verset 4.35, qui traite d'une possible médiation et réconciliation, et aussi avec le verset 4.128 qui traite du cas où c'est la femme qui craint le comportement de son mari.
Personnellement, je pense que Wakas a raison ici, mais la faiblesse de son argumentation est que celle-ci ne vaut qui si le verset 4.34 a la même origine (même auteur ou même révélation, comme on veut) que le reste du Coran.
Or pour des raisons philologiques que j'ai expliquées plus haut, je pense que ce verset 4.34 (et aussi 4.35) ne faisait pas partie de la révélation initiale.
Néanmoins, il est possible que Shahrour n'ait pas eu complètement tort sur le sens de "rijal" et "nisa". Je m'explique.
Le verset 4.34 contient l'expression en arabe "Fađđala Allāhu Ba`đahum `Alá Ba`đin" : en raison des faveurs qu'Allah a octroyées aux uns par rapport aux autres.
Noter que Ba`đin, qui renvoie au mot "nisa", féminin, est masculin, alors que logiquement il aurait dû être au féminin.
Or cette expression ou ses variantes est employée dans d'autres contextes. Par exemple, au verset 2.253 : Parmi ces messagers, Nous avons favorisé certains par rapport à d´autres / Tilka Ar-Rusulu Fađđalnā Ba`đahum `Alá Ba`đin.
Ou au verset 4.95 : Allah donne à ceux qui luttent corps et biens un grade d´excellence sur ceux qui restent chez eux / Fađđala Allāhu Al-Mujāhidīna Bi'amwālihim Wa 'Anfusihim `Alá Al-Qā`idīna.
Par conséquent, mon hypothèse personnelle (non prouvée, je précise) est qu'il y ait eu une version initiale et différente du verset 4.34, visant à établir un parallèle entre la situation des rijal vs. des nisa, au sens de Shahrour, et la situation des messagers les uns par rapport aux autres, ou la situation de ceux qui sont actifs vs. ceux qui sont passifs.
Un tel sens aurait été logique dans ma compréhension générale du Coran, car ailleurs, le Coran pointe largement la responsabilité des élites dans la mise en place du Din.
Mais un scribe, peu de temps après, aurait ensuite tripatouillé ce verset 4.34, (et plus généralement la sourate 4) pour en produire un verset d'ordre privé et familial.
Pourquoi ? Parce que le Coran est en fait une série de prêches de prédication, qui devaient être propagées à travers l'Arabie par des missionnaires (même la tradition islamique le dit d'une certain façon) qui devaient les lire devant des assemblées, lors de la salat. Ces missionnaires sont métaphoriquement désignés par les "Anges" / malaikat dans certains versets.
Vraisemblablement, certains de ces "anges" ont dû introduire de leurs idées personnelles en restituant les prêches à leur auditoire, comme le font des prêtres aujourd'hui. D'ailleurs, si le Coran insiste pour qu'on n'introduise pas de ses idées personnelles en prétendant qu'elles viennent de Dieu, ce n'est peut-être par hasard.
Quand 20 ou 30 ans plus tard on s'est avisé de collecter ces prêches (peut-être sous l'impulsion d'un certain Othman), il a fallu harmoniser des variantes entre ces prêches, et ce n'était pas des petites variantes orthographiques comme on le voit maintenant avec les manuscrits qui restent, y compris les manuscrits de Sana'a.