Là où les religions peuvent se rencontrer

" Eckhart et Maître Eckhart"
(Traduction Robert Geoffroy, vidéo visible sur [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Bienvenue ! « L’œil avec lequel je vois Dieu est l’œil avec lequel Dieu me voit ». C’est l’une
des formulations profondes et énigmatiques de la personne sur laquelle nous allons nous
pencher aujourd’hui, parce qu’il est temps pour nous de nous intéresser à un autre livre ou à
un autre enseignement comme nous le faisons de temps en temps. Et pour aujourd’hui, j’ai
une bonne surprise pour vous en magasin. Je vous dirai ce que c’est dans une minute, mais
juste un petit rappel avant que je le fasse.
Je ne vais pas donner un cours magistral, ni faire une étude universitaire. Quand nous
considérons un livre, nous n’approchons d’une manière différente, non pas de façon
analytique, ni historique, mais en essayant d’aller à l’essence même de tout enseignement que
le livre contient. Or, pour aller à l’essence même d’un enseignement, d’un enseignement
spirituel, ce dont il est toujours question, il nous faut aller à l’essence même de qui nous
sommes. Qu’il s’agisse d’un enseignement spirituel contemporain ou qu’il remonte à deux
mille ans, l’enseignement spirituel ne concerne jamais rien qui ne soit pas vous. Il parle
toujours de vous.
Donc, quand nous regardons un livre, ce que nous faisons ici de temps en temps et comme
nous allons le faire aujourd’hui, nous n’examinons pas vraiment un livre, nous vous
regardons ou plutôt vous vous regardez vous-même par l’intermédiaire d’un enseignement
spirituel particulier. Nous n’étudions donc rien d’extérieur à vous. Cela ne servirait à rien.
Cela pourrait être divertissant, mais pour cela, vous pouvez toujours aller à l’université. Il y a
aussi une place pour cela, Mais nous nous intéressons ici à quelque chose de plus important et
c’est l’essence de qui vous êtes afin que vous puissiez réaliser cette essence et commencer à
vivre depuis cette essence et à travers elle qui est au-delà de la personnalité.
Pour notre livre d’aujourd’hui, je précise que ce n’est pas vraiment un livre en tant que tel
bien qu’il ait physiquement l’apparence d’un livre. C’est un enseignement et il y a différents
livres qui comprennent des parties de cet enseignement. Aujourd’hui, nous remontons environ
sept cents ans en arrière au Moyen-Âge en Europe. C’est l’aspect superficiel. En essence,
c’est bien sûr toujours maintenant comme vous allez le voir. Nous remontons sept cents ans
en arrière et nous allons regarder les enseignements de mon homonyme, Maître Eckhart qui
est né vers 1260 en Allemagne et c’était bien sûr un moine. À l’époque, seuls les moines
pouvaient lire et écrire. Il a appartenu à l’Ordre Dominicain dont il est devenu un personnage
important, un enseignant connu, célèbre. Il a enseigné à Paris et en d’autres endroits.
Maître Eckhart a été oublié pendant quelques siècles et redécouvert vers le XIXe siècle. Il est
pris parfois pour un philosophe, mais ce n’est pas vraiment un philosophe. C’est un mystique,
oui, et principalement un enseignement spirituel, l’un des enseignants spirituels les plus
profonds et puissants de tous les temps. Il enseignait bien sûr dans les limites de l’église de
l’époque. Il avait toujours derrière son dos, pour ainsi dire, la police de la pensée del’institution ecclésiastique. Une pensée fausse exprimée en public pouvait facilement vous
conduire à la mort et une mort très déplaisante.
Il enseignait donc sous cette contrainte et ce fut un miracle qu’il pût donner naissance à un
enseignement spirituel puissant et absolument vivant dans les limites de la terminologie qu’il
devait utiliser. Vers la fin de sa vie, de plus en plus de critiques se sont élevées et son
enseignement fut condamné par les autorités ecclésiastiques, le pape, le Vatican et
heureusement, il est mort juste avant que ne lui parvienne la nouvelle de la condamnation de
son enseignement.
Notons un fait intéressant concernant ses enseignements : Les plus importants de ceux-ci qui
sont appelés « les sermons allemands » ont été pour la plupart dispensés à des femmes, à des
auditoires de religieuses, parce qu’il était conseiller spirituel dans les couvents, l’une de ses
fonctions. Donc il allait dans les couvents et dispensait ses enseignements profonds et
puissants en langue allemande. C’était également révolutionnaire, parce que jusqu’alors,
pratiquement tous les enseignements de ce genre étaient donnés en latin. Il fut donc l’un des
premiers à utiliser les langues locales. Ce sont les enseignements les plus puissants. La façon
dont il utilise le langage est absolument unique. Il crée parfois ses propres mots.
Nous allons bien sûr parcourir ses enseignements traduits en anglais. Ils sont certainement
plus puissants en version originale. C’est généralement le cas quand vous traduisez un texte
inspiré. Il souffre un peu de la traduction. Mais c’est bien aussi. En tous cas, même si vous
lisiez et parliez allemand couramment, vous ne liriez toujours pas l’original, parce que la
langue originale dans laquelle il s’exprimait est l’ancienne forme d’allemand qui serait très
difficile à déchiffrer, même si vous parliez l’allemand moderne. Cela s’appelle le moyen haut-
allemand. Même un lecteur allemand aurait donc besoin de la traduction. C’est plus éloigné
de l’allemand moderne que ne l’est l’anglais de Chaucer par rapport à l'anglais moderne.
Je crois que le fait qu’il enseignait à des femmes est un facteur très important pour ce qui
passait par lui. Si vous regardez certains de ses sermons en latin, dont la plupart sont donnés
dans un cadre académique plus conventionnel, Ils ne sont pas aussi puissants. Ils sont plus
conventionnels, plus bruts que les « Sermons allemands » Je dirais qu’il trouvait dans
l’auditoire féminin une réceptivité beaucoup plus grande pour ses enseignements et ses
enseignements n’auraient probablement pas existé s’il n’avait pas eu cet auditoire féminin
réceptif, parce que, comme le dit l’ancien dicton, « Ensemble, l’enseignant et l’enseigné font
l’enseignement ».
Regardons donc certains de ses enseignements. Ce n’est pas une philosophie systématique.
Nous pouvons prendre presque n'importe quel fragment de maître Eckhart. Disons au passage
que Maître ou Meister en allemand était son titre académique et que personne ne sait si
Eckhart était son prénom ou son nom de famille. Nous pouvons pratiquement prendre
n’importe quel élément des enseignements, le regarder et voir, dans beaucoup de cas, qu’il
contient déjà le tout. C’est la beauté des grands enseignements spirituels.
Regardons le petit élément avec lequel j’ai commencé. Je vais me référer de temps en temps à
ce livre de Maître Eckhart de Penguin Classics ; Les sermons et les causeries sélectionnés de
Maître Eckhart, écrits sélectionnés. Il y a d’autres livres qui contiennent d’autres sélections.J’ai également griffonné quelques autres citations d’un ou de deux autres livres que je vous
lirai.