Rappel du premier message :
5 octobre 2011
Introduction: wahhabisme (les anti-doctrinaux) [1]
Après avoir mis l'accent dans les premiers chapitres sur l'importance pour un musulman (Muqallid) de suivre une doctrine pour préserver sa religion et après avoir montré le danger de la mauvaise interprétation des textes et définit les conditions de la fatwa en Islam sunnite, nous abordons ici l'histoire et les bases d'un mouvement dangereux qui connaît une expansion vertigineuse surtout chez les jeunes, profitant d'une situation politico socio-économique dégradée (du monde musulman) et du manque d'autorité religieuse compétente et reconnue en la matière.
Les wahhabites soutenus depuis leur apparition par les américains et les britanniques ont su profiter du pétrodollar pour exporter leur idéologie dans le monde.
Doctrine des wahabbis et circonstances de leur apparition
Les wahhabis ne sont à la Mecque que depuis 1750. Avant, les territoires sacrés étaient sous l'autorité religieuse de la descendance du Prophète (paix et salut sur lui) et sous l'autorité politique et administrative de la porte sublime (l'empire Ottoman). On pratiquait alors librement les Mawâlîd (célébration de la naissance du Prophète) dans la mosquée sacrée et on visitait sans restriction le tombeau du Prophète (paix et salut sur lui)...
Le « Kitâb al-Tawhîd » ou " Traité de l'unicité divine " de Muhammad Ibn ‘Abd Al Wahhâb An-nadjdî est considéré comme l'ouvrage de référence de la théologie wahhabite.
Le wahabbisme fait partie de ce que certains savants sunnite spécialistes[2] appellent « As-salafiyya An-nassiyya[3] » ; c'est-à-dire la « salafiyya »qui se contente strictement du texte[4]et donc impose un traitement juridique vertical à toute affaire, sans tenir compte du temps et de l'espace (du contexte) (même pour les affaires à divergence connue et les sujets d'actualité). Le Wahhabbisme se caractérise entre autre par les points doctrinaux suivants:
* Vouloir imposer Un avis unique même pour les sujets à divergence connue entre les savants (c'est à dire qu'il ne peut y avoir, selon plusieurs auteurs Wahhabites, deux avis ou plus recevables sur une question de l'Ijtihâd)
* Une interprétation littéraliste (exemple: beaucoup d'auteurs wahhabites prétendent à Dieu des directions ou un lieu !!)
*Renier le fait qu'un musulman Muqallid doit suivre une des quatre écoles (madhâhib),
*Permettre à tout Muqallid d'accéder à l'effort juridique (Ijtihâd) sans considération des normes et règles émises par les savants des quatre doctrines et autres (ce qui est très dangereux),
*Étendre la notion d'innovation blâmable ou égarée à de nombreuses choses nouvelles, même licites (sans considération des règles prescrites par les anciens savants de la sunna pour distinguer les différents types d'innovation[5])
*Dire qu'ils sont « le groupe sauvé » et que tous ceux qui ne sont pas en accord avec eux sont des égarés ou du moins pas conformes aux "traces des salafs".
*Et surtout accuser les soufis, les ash‘arites et beaucoup de musulmans, de mécréance (kufr) et d'hérésie.
Les wahabbis ont été soutenus et utilisés par les britanniques pour contrôler l'Arabie et affaiblir l'empire ottoman (surnommé l'homme malade à l'époque)...
Les circonstances de leur apparition sont liées à un besoin de réforme sociale et religieuse d'une société marquée à l'époque par les superstitions et l'ignorance… Ils ont essayé donc de se baser sur leurs propres efforts juridiques pour construire une doctrine puritaine qui va jusqu'à nier les quatre doctrines reconnues par l'ensemble de la Umma (communauté).
Ils ont été surtout favorisés par les tendances du nationalisme arabe (une identité arabe contre l'empire Ottoman)[7] .
Notes :
[1] Etude tirée de plusieurs références historiques dont : « Fiqh Ahmad Ibn As-siddîq Al-ghumârî » (étude comparative) : auteur : Abî Muhammad Al-hasan Ibn ‘Ali Al-kattânî Al-atharî : édition : Muhammad ‘Ali Bîdûn, Dâr Al-kutub al-‘ilmiyya : Beyrouth Liban : p : 25-28. Amîn Ar-rayhânî «Târîkhu Najd » : (3éme édition : dâr arrayhânî : Beyrouth, 1964) ; Mustafa Talâs : « ath-thawra al-‘arabiyya Al-kubrâ (4éme édition, dâr talâs, Damas, 1986) ; Mahmoud Shâkir : « at-târîkh al-islâmî »: (première édition : al-maktab al-islâmî, tome 8 : Beyrouth). Abdel ‘Azîza-shenâwî : « A-ddawlatu al-‘uthmâniyya dawlatun Muftarâ ‘alayhâ » (première édition : maktabatu Al-anjilou al-misriyya, tome II : Le Caire1984).
Pour mieux comprendre le mouvement Wahabbi :se référer utilement à: « As-sawâ‘iq Al-ilâhiyya fî ar-radi ‘alâ al-wahhâbiyya wa man kaffaraal-muslimîna wa hakama bi riddatihim bi ghayri wajhi haqqin» (les tonnerres divins pour répondre aux wahabbis et ceux qui traitent les musulmans de mécréants (d'apostats) et d'innovateurs) du Sheykh SulaymânIbn ‘Abdelwahhâb (le propre frère de Muhammad Ibn ‘Abdelwahhâb ) : aux éditions de l'institut Al-Azhar: Maktabatu At-tahdhîb, le Caire .
Voir aussi : As-salafiyya : marhalatun zamaniyyatun mubârakatun lâmadhhabun islâmî : le salafisme est une période bénie (qui fait allusion aux ancêtres pieux) et non pas une doctrine de l'Islam : une bonne étude sur l'histoire du salafisme wahabbite moderne et son idéologie : auteur : le Shaykh syrien Muhammad Saïd Ramadâne Al-bûti :(en arabe et en français).
[2] Voir « Ihtîfâl bi al-mawlid An-nabawî » du professeur Al-Bashîr Al-mahmoudî : éd. : Al-matba‘atu wa al-warrâqatu Al-wataniyya :Marrakech, 2006 : pages 36--39.
[3] On trouve aussi sous cette catégorie : la « salafiyya at-taymiyya » et la « salafiyya hanbaliyya » qui sont modérés et prennent en considération les arguments des compagnons et des anciens savants : ils reconnaissent le soufisme et la doctrine théologique du Ash‘arisme. La deuxième catégorie de salafisme est la « salafiyya fiqhiyya » qui représente une continuité et une concordance avec la logique et les instruments juridiques des quatre doctrines : donc pour elle, il y a un traitement juridique horizontal et vertical des affaires(qui prend en considération les variables du temps et de l'espace tout en restant lié au texte traditionnel et sa finalité : en utilisant les règles prescrites par les compagnons et par les quatre doctrines pour l'Ijtihâd).. Même référence page 40.
[4] Leur doctrine repose sur leur interprétation personnelle du Coran et de la Sunna. Le wahabbisme se considère comme un mouvement et non pas comme une doctrine mais la réalité et l'impact de ses fatwa fait qu'il ne peut qu'être classé comme doctrine, voir même comme une idéologie dangereuse.
[5] Voir le chapitre du dogme correct/ la définition de l'innovation en Islam.
[7] L'empire Othoman représentait (bien que turque et non arabe donc non qurayshite) la Khilâfa islamique chez les savants sunnites de l'époque.
Voir le site malikite-fr
A suivre ....