ALLEMAGNE
Polémique sur le sexe de Dieu
Fabien Trécourt - publié le 16/01/2013
Un débat politique inattendu sur le genre de Dieu fait rage en Allemagne. Anecdotique, la querelle n’en est pas moins révélatrice de l’air du temps.
En Allemagne, les politiques débattent… du genre de dieu. C’est un entretien avec la ministre de la famille, Kristina Schröder, accordé à l’hebdomadaire Die Zeit, qui a mis le feu aux poudres. Alors qu’on lui demandait s’il était difficile de parler de dieu au masculin à une petite fille, la ministre a rétorqué : « L’article est sans signification, on pourrait aussi dire das liebe Gott », autrement dit recourir au genre neutre. La langue allemande connaît en effet un troisième genre grammatical : ni masculin — on dirait der liebe Gott — ni féminin (die).
Cette subtilité a soulevé un tollé, notamment chez les membres de l’Union chrétienne démocrate, le parti conservateur au pouvoir. Pour beaucoup de croyants, dieu est « le Père », et l’interprétation de Kristina Schröder relève du politiquement correct si ce n’est de la « sottise intellectuelle ». Mais la ministre tient bon et fait savoir, par le biais de son porte-parole, que dieu n’était « bien évidemment » ni homme ni femme, citant plusieurs ouvrages du pape Benoît XVI pour appuyer ses dires.
Cette actualité est révélatrice d’une tendance de fond. Comme l’explique l’historien Jacques Dalarun dans Dieu changea de sexe, pour ainsi dire (Fayard, 2008), la religion s’est féminisée au cours de son histoire. Alors qu’elle était plutôt patriarcale, entre l’Antiquité et le haut Moyen Age, elle s’est ouverte aux femmes au tournant des XI et XIIe siècles, et surtout au XIIIe, avec l’émergence d’une iconographie qui leur fait une meilleure place. Conséquence logique : ce renversement atteint parfois « une vision de l’humanité au-delà des genres ».
Le débat allemand est en outre dans l’air du temps : de plus en plus de pays européens ouvrent le mariage civil aux couples de même sexe ; l’égalité entre les hommes et les femmes est sur le devant de la scène depuis un demi siècle… La différence sexuelle fait débat à bien des égards. Et dès lors que, comme l’avance le philosophe Nietzsche notamment, l’homme et dieu sont corrélatifs, si l’un n’a pas de genre, l’autre n’en aurait peut-être pas non plus.
Le Monde des Religions
publié le 16/01/2013
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Dans la Théogonie d’Hésiode Éros en grec ancien Ἔρως est le dieu de l’Amour et de la puissance créatrice.
L'Éros sexué naît quant à lui de la castration d'Ouranos par Cronos. Cronos a en effet lancé le sexe de son père à la mer et de là naissent Aphrodite, Himéros et l'Éros sexué à l'origine de l'union entre les mâles et les femelles.
Dans la théogonie orphique, Éros est à l'origine de la création. Il nait de l'œuf cosmique issu de l'union de l'Éther et du Chaos. Il est à la fois mâle et femelle.
Fort heureusement les monothéismes nous épargnent de tels avatars.
Alors pourquoi chercher un "sexe" à Dieu ?
Désolé de vous contredire mais l'ovocyte à peine est-il fécondé par un spermatozoïde a déjà un "genre" mâle ou femelle.
Que les organes sexuels ne se développent qu'après plusieurs semaines c'est tout autre chose : l'ovocyte est déterminé mâle ou femelle selon son chromosome XY ou XX.
Dans le cas de Jésus reste un mystère : comment pouvait-il être Homme alors qu'il est censé ne pas avoir de géniteur mâle pour apporter le XY ?
A défaut du facteur XY que Marie ne pouvait lui apporter Jésus aurait dû être femme. Mystère.
Quand vous parlez de sexe, à quoi pensez-vous donc ?
En chrétienté nous avons Dieu "Père".
En islam chaque être humain de la Umma est rattaché comme par un cordon ombilical à une "matrice", or la matrice Umm est symbole éminemment féminin. Car Umm est autant la mère que la matrice (de la femme dont la fonction est de porter les enfants de son époux).
En ce qui concerne le langage biblique, nous avons parfois négligé de voir, à cause de nos habitudes de penser, qu’il y a, dans la Bible, des termes féminins appliqués à Dieu.
La Bible dit, en effet, que Dieu nous aime autant comme une mère que comme un père. Dans l’Ancien Testament, la tendresse ou la compassion de Dieu envers son peuple est exprimée par un mot qui, en hébreu, est un pluriel dont le sens est: le ventre maternel. L’utilisation d’un tel mot traduit chez Dieu un sentiment proche d’une réalité physique. Ce n’est pas un hasard si la plus grande concentration de termes féminins pour parler de Dieu se trouve dans le livre de la consolation d’Israël, en Esaïe 40 à 66.
On trouve, dans la Bible, des métaphores masculines, féminines ou neutres, qui décrivent un des aspects de la réalité divine, mais pas toute cette réalité. Dans le Nouveau Testament, nous lisons: “Le Seigneur est mon berger”, Jésus est l’“époux” de l’Eglise. On dit aussi que Dieu est “roi”, qu’il est chef et souverain de la création, etc. Ces images masculines ont, dans la Bible, la même fonction que les images féminines.
En tant que chrétiens, si nous disons bien que Dieu est comme un rocher, nous ne dirions jamais qu’il est comme un père ou que Jésus-Christ est comme un fils; ce serait réduire, diminuer, la dimension de la nature divine.
En disant “Dieu est comme une mère”, nous formulons une métaphore qui correspond à un aspect de Dieu: sa compassion, sa tendresse. En disant “Dieu est Père”, nous évoquons Dieu, de façon globale, dans son éternité, par rapport à Jésus-Christ et comme notre Père à qui nous pouvons dire Abba, Père..
Le fait que Dieu utilise des mots masculins pour décrire l’ensemble de son être et de ses actions ne signifie pas qu’il soit un "mâle".
Dieu aurait pu se révéler en utilisant des mots féminins, mais il ne l’a pas fait pour une raison précise : La Bible ne dit jamais que Dieu est “mère”, parce que porter et nourrir un enfant, donner naissance à un enfant, l’engendrer sur le plan humain, c’est exercer une fonction maternelle.
Dans le théisme biblique, le Dieu transcendant, Créateur, instaure une séparation entre lui-même et le monde; dans le panthéisme, le monde existe en dieu et dieu existe dans le monde.
Cette différence fondamentale explique pourquoi la Bible n’identifie jamais Dieu à une mère.
A la différence des religions païennes qui n’ont pas besoin de Médiateur, la religion théiste, parce qu’elle différencie Dieu de la création, ne peut pas exister, au sens sotériologique, sans Médiateur.
Le féminisme, d’une manière consciente ou non, est un refus, non plus du patriarcat, mais du Dieu souverain, roi de la création.